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le numérique en cours de français, accélérateur de créativité au service de la lecture

mis à jour le 11/12/2023


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Christelle Guillot est enseignante de Lettres au lycée Estiennes d'Orves où elle entreprend de raviver le goût de la lecture à l'aide du numérique. Elle nous ouvre les portes de sa classe pour nous immerger dans l'univers créatif de la lecture 2.0.

mots clés : èchanger, numérique, lecture, lettres, éducation aux médias et à l'information, pédagogie


Si une grande majorité d'élèves exprime avoir aimé lire pendant l'enfance, beaucoup affirment s'être éloignés de la lecture dès le collège, constate Christelle, sous l'influence de plusieurs facteurs : les lectures imposées, le manque de temps, l'intrusion dans leur vie du smartphone et la place accordée aux loisirs, aux amis. Un récent sondage Ipsos souligne ce décrochage qui s'accentue chez les 15-24 ans malgré le développement de nouvelles pratiques de lecture au format numérique1. À l'entrée au lycée, le livre est souvent devenu secondaire voire une obligation inhérente à l'école et particulièrement à l'enseignement des lettres. Ce bilan nourrit chez Christelle, la volonté de susciter chez les lycéens l'envie de lire et de découvrir les œuvres. Le numérique présente pour cela de multiples avantages notamment ceux de booster la créativité des élèves, de favoriser le partage d'expérience de lecture et la valorisation par la diffusion des travaux d'élèves. Comment l'usage du numérique en cours de français, peut-il, en tant qu'accélérateur de la créativité de l'élève, redonner le goût de la lecture ?

La lecture est au cœur de l'enseignement du français. Et c'est d'abord au contact du livre qu'elle prend corps. Il s'agit d'impulser un rythme soutenu dès la rentrée faisant prendre conscience aux élèves de l'importance de la lecture en cours de français et les mettant au diapason des programmes de l'enseignement du français au lycée2 qui reposent sur l'étude d’œuvres intégrales et leur mise en résonance avec d'autres ouvrages, nécessitant le développement d'une culture littéraire étoffée au contact de groupements de textes et de lectures cursives3.
 
Dans sa programmation, Christelle consacre un créneau d'une heure par semaine en demi-groupes à la lecture et au travail associé, dans lequel le numérique entre en jeu. Elle met en place jusqu'en janvier un rituel de début de séance où élèves et enseignante se plongent dans une lecture silencieuse pendant dix minutes, et, dès la première heure de cours de l'année, les élèves sont accueillis pour une séance au CDI. À l'issue de cette séance, les élèves repartent avec un emprunt, parmi une sélection de livres préparée en amont et mise en valeur par la documentaliste et l'enseignante, appartenant à la littérature exclusivement contemporaine française ou étrangère, et un premier objectif, la lecture du livre dans les quinze jours à venir. Pour tenir ce délai serré de la lecture de l’œuvre, des conseils méthodologiques sont donnés.
La pratique de la lecture s'accompagne d'un travail associé avec des activités à réaliser en autonomie. Pour la première lecture, il s'agit de la création d'un marque-page avec note d'intention et la préparation d'un “tête à tête littéraire”. Ensuite, l'enseignante établit une progression avec des activités variées dans l'objectif de faire lire davantage. L'usage du numérique apparaît comme moyen d'attiser l'intérêt des élèves et d'accélérer leur créativité, d'autant que Christelle regorge de propositions : Un autoportrait de lecteur permet à chacun de s'interroger sur sa posture de lecteur et de faire connaissance en début d'année. En décembre, un calendrier de l'Avent permet de valoriser et de diffuser les travaux d'élèves. La bande annonce de livre, la couverture sonore, le set de plateau de cantine ou encore le Bookflix dynamisent le partage d'expérience de lecture entre pairs. Enfin, les outils de communications modernes souvent bien maîtrisés des élèves permettent une transposition moderne des textes classiques et mettent en lumière leur intemporalité.
 
Les activités proposées ne sont pas systématiques, “Je varie les productions en fonction des titres, précise Christelle. Par exemple, sur un roman en lien avec une séquence sur le désir d’émancipation des femmes dans la littérature, les élèves devaient rédiger et mettre en voix la lettre de leur héroïne à un personnage de leur choix. Ils devaient réinvestir des procédés d’écriture vus en classe et intégrer des citations du roman pour prouver, démontrer qu’ils l’avaient lu attentivement. Pour le roman Bitna sous le ciel de Séoul de Le Clézio, ils ont dû imaginer une déambulation sonore dans la ville de Séoul sous la forme d’une story instagram car l’héroïne utilise à plusieurs reprises son smartphone dans le roman. Dans tous les cas, ces travaux sont diffusés, commentés en classe”. De quoi donner des idées d'activités numériques créatives autour de la lecture.
Le numérique apparaît ainsi comme une solution face au désintérêt de certains élèves pour la lecture par sa facilité de diffusion et l'enjeu de la réception qu'il modifie. En effet, le compte-rendu de la lecture n'est plus destiné au seul enseignant ni à la seule vérification de la lecture dans le but d'obtenir une note. On lit pour soi, mais aussi pour les autres dans une volonté de partage d'expérience, de sensibilité. La publication des travaux est facilitée par un mur numérique sur digipad dédié aux lectures. Le numérique est alors un pont entre l'élève, ses pairs, l'enseignante et plus largement le lycée où QR-codes et affiches sont apposés.
L'activité numérique facilite aussi la vérification du travail par une projection des travaux en classe ou la confrontation entre pairs qui favorise alors la co-évaluation. Des retours en grand groupe sont l'occasion de noter les points forts et les points à améliorer. Si toutes les activités ne sont pas notées pour l'ensemble de la classe, Christelle peut demander à un petit nombre d'élèves tirés au sort de lui envoyer leur production afin de l'évaluer.
 
Pour se lancer, que ce soit du côté professeur ou élève, quelques éléments relatifs aux connaissances de base en numérique sont indispensables et des freins sont à lever. Néanmoins, Christelle n'a jamais eu de formation au numérique et a appris sur le tas comme en témoigne son parcours. Encore une occasion de lever les réticences, d'autant que le bilan dressé par l'enseignante avec ses classes en cette fin d'année scolaire est positif. Si les activités d'appropriation sont appréciées par soixante pour cent des élèves car elles diversifient le cours et sont aussi un facteur de progrès puisqu'elles sont évaluées et donc obligent à lire les œuvres, quatre-vingt-dix pour cent des élèves disent avoir lu plus que les autres années et les dix minutes de lecture en début de cours sont plébiscitées à cent pour cent : “J’ai progressé en lecture car les évaluations régulières me forçaient à lire. Les dix minutes de lecture incitent à lire davantage.” déclare Jeanne, ou encore, “Les dix minutes sont une bonne idée car pour ceux qui n'aiment pas la lecture, cela permet de se forcer, et de finalement voir que la lecture n'est pas une fatalité.” ajoute Liam. Christelle remarque avec intérêt l'usage du verbe “forcer” qui revient dans de nombreux témoignages faisant de la lecture un effort auquel ils sont contents de s'être confrontés et souligne : “Je suis contente de constater cette formulation car je suis convaincue depuis longtemps qu'il faut en passer par là pour retrouver le plaisir”. Une invitation à renouer avec le plaisir de lire et à montrer à nos élèves une littérature résolument moderne.



1. Plus de 8 Français sur 10 se déclarent adeptes de la lecture - Ipsos
2. Programme de français de première des voies générale et technologique - www.eduscol.education.fr
3. Le BO du 2 novembre 2006 définit la lecture cursive : “La lecture cursive est la forme libre, directe et courante de la lecture. Elle se développe dans la classe, et en dehors de la classe, afin de conduire vers les livres des élèves qui n’en ont pas toujours l’habitude ni le goût. Elle est avant tout une lecture personnelle et vise à développer l’autonomie des élèves.”
 
auteur(s) :

É Rauhut

contributeur(s) :

C. Guillot, D. Faure, F. Thibault, Lycée Estienne d'Orves - Carquefou [44}

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