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devoirs faits : temps et espace de travail personnel du collégien repensés

mis à jour le 26/06/2019


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Depuis novembre 2017, chaque collège doit proposer aux élèves volontaires un temps de Devoirs faits où l’enfant pourra travailler librement et individuellement en bénéficiant au besoin de l’aide d’un adulte. Au collège Jean Moulin de Marolles-les-Braults (Sarthe), petit collège rural de deux cents élèves, on a anticipé la réforme dès septembre 2017. En deux années, c’est un projet global qui se construit progressivement avec ce questionnement : comment faire de Devoirs faits un outil efficient au service d’un projet global d’accompagnement de l’élève vers l’autonomie et la bonne gestion du travail personnel ?

mots clés : échanger, Devoirs faits, accompagnement, différenciation pédagogique, co-éducation, coopération


L’histoire et le profil du collège Jean Moulin ne sont certes pas neutres : d’abord, ce collège a hébergé jusqu’en 2014 le seul internat mixte de la Sarthe en collège. Il accueillait alors dix-sept élèves au parcours scolaire souvent complexe, ce qui conduisit l’équipe éducative à s’interroger et à proposer aux internes des temps d’études et un accompagnement au travail personnel. De même, le fait que 85% des élèves soient présents en continu au collège chaque jour de 8 heures à 17 heures donne une homogénéité et une présence sur site supérieure au temps d’enseignement : cela laisse la latitude et incite même à la mise en place de dispositifs et activités propres à aider et à optimiser le temps de présence des élèves tout au long de la journée.
 
Cela peut expliquer en partie la mise en place très précoce de Devoirs Faits dans le collège dès septembre 2017 alors que le dispositif devait être initié en novembre. Mais une conviction profonde sous-tend aussi cette mise en route rapide: c’est en tout début d’année que les élèves, notamment les plus jeunes, ont le plus besoin de conseils méthodologiques et d’apprendre à organiser, planifier et réaliser efficacement leur travail personnel. M. Jambou, principal, insiste sur un point essentiel à ses yeux dans la compréhension du dispositif par les familles : bien communiquer sur l’idée que Devoirs faits est un temps très précieux pour apprendre à apprendre et pour se faire aider dans son travail, mais sans se substituer au travail à la maison. Il doit au contraire permettre à terme de pouvoir travailler mieux et plus efficacement seul à la maison, en apprenant des méthodes de travail notamment. Cela est d’autant plus crucial en sixième qu’en primaire. Depuis la circulaire du 23 novembre 1956, les devoirs sont inscrits exclusivement dans le temps scolaire et interdits à la maison, pour des raisons d’efficacité et de santé notamment1. Les jeunes collégiens manquent donc d’une culture et de repères concernant le travail personnel. Autre aspect important du dispositif, chaque classe se voit inscrire une heure de Devoirs faits dans son emploi du temps ; cette heure est faite en sixième obligatoirement par le professeur principal, par groupes de huit maximum. Le fait d’inscrire ce temps dans l’emploi du temps, même s’il reste facultatif comme le veut la loi, est symboliquement important notamment pour iclure parmi les missions du PP (Professeur principal) en sixième l’accompagnement de Devoirs faits. Par ailleurs, conscient qu’une heure hebdomadaire peut ne pas suffire à tous pour étayer au mieux le travail personnel, l’établissement propose aux élèves cette année une seconde heure par semaine au centre de connaissances et de culture (ex CDI). La professeure documentaliste dispose en effet d’un volant de six heures hebdomadaires pour accueillir et accompagner des petits groupes d’élèves. Ainsi, en sachant que l’heure de vie de classe est intégrée aussi dans l’emploi du temps et effective chaque semaine de la sixième à la troisième à Jean Moulin, un sixième peut ainsi disposer chaque semaine d’une heure de Devoirs faits avec son PP, d’une heure avec la documentaliste et de l’heure de vie de classe assurée par le PP, soit trois heures d’accompagnement effectives. Enfin, la création d’un Passeport aide aux devoirs, permettant tant au professeur d’évaluer la présence et l’implication de l’élève qu’à ce dernier de faire le bilan de cet accompagnement, matérialise l’importance donné à ce temps et la démarche réflexive et exigeante du projet.
 
Néanmoins, si toute cette mise en place témoigne assurément d’une démarche volontariste, l’innovation principale est ailleurs. Elle réside dans la construction, à partir et autour de Devoirs faits, de tout un réseau d’initiatives qui font que c’est chaque jour et sous des formes multiples que l’élève peut bénéficier d’un accompagnement au travail. Ainsi, le collège a décidé qu’en sixième, chaque professeur principal (qui assure donc l’heure Devoirs faits) coanimerait une heure par semaine un cours de français et une heure par semaine un cours de maths de “sa” classe ; ce qui permet à cet enseignant, notamment s’il enseigne une discipline à faible quotité horaire, de passer
deux heures supplémentaires par semaine avec les élèves. Cela lui fournit l’opportunité d’observer leur implication en classe, de travailler, de s’organiser. Cela favorise un accompagnement d’autant plus précieux et efficace sur le temps Devoirs faits lui-même, comme en témoigne un enseignant. Par ailleurs, un tiers des professeurs de l’établissement est volontaire (bénévolement) toute l’année pour ouvrir leur salle de cours jusqu’à trois midis par semaine (12 h 45-13 h 30 environ), afin d’écouter, conseiller, accompagner les élèves dans leur matière notamment, pour une simple question ou un travail plus conséquent. Cette disponibilité est officielle puisque communiquée aux élèves dès le début d’année. Autre facilité importante, l’accès libre laissé aux élèves hors temps de cours à la salle informatique (le collège est collège numérique donc bien équipé dans ce domaine) et à la salle de permanence. Ce fonctionnement sur la confiance et la bienveillance et la mise à disposition de lieu et de moyens facilitent aussi la mise au travail personnelle, l’apprentissage de l’utilisation des outils numériques dans le travail personnel ainsi que l’entraide et la coopération entre élèves. Enfin, l’existence au collège d’une possibilité de “mini-service civique”, appelé Projet d’action citoyenne, a permis entre autres cette année à trente-et-un élèves de quatrième de mener pendant sept semaines, et avec un encadrement, un projet de tutorat et d’accompagnement au travail de vingt-sept élèves de cinquième en réelles difficultés, d’où le nom non dénué d’humour de ce parcours : “Il faut sauver le soldat 5e” ! Et si les élèves accompagnés apprécient beaucoup ce compagnonnage, cela est vrai aussi des aidants comme en témoigne Léa : “J’ai donné des conseils sur les méthodes de travail et des techniques pour apprendre les cours. J’ai dû m’adapter à chaque élève pour mieux les aider (…). Cela m’a permis aussi de valider mes compétences du socle”. Et Louane complète : “Les conseils d’un élève plus grand plutôt qu’un professeur sont peut-être parfois plus compréhensibles pour des élèves en difficultés. On a pu leur donner des conseils sur certaines méthodes de travail. J’ai pu faire aussi quelques révisions sur les notions passées. Et j’ai apprécié de valider des compétences par cette action”.

S’il est encore tôt pour présenter une évaluation de Devoirs faits au collège Jean Moulin on peut constater que plus de 50 % des élèves (et même jusqu’à 65 % des quatrièmes par exemple sur la dernière période) de la sixième à la quatrième y participent (un peu moins en troisième), ainsi que 50 % des enseignants. Mais retenons l’intérêt premier du projet de ce collège rural qui est sans doute de considérer Devoirs faits comme un levier permettant de mettre en musique un projet global à multiples facettes autour de l’accompagnement du collégien dans son travail personnel.


1. “6 h de classe bien employées constituent un maximum au-delà duquel un supplément de travail soutenu ne peut qu’apporter une fatigue préjudiciable à la santé physique et l’équilibre nerveux des enfants. Enfin le travail écrit fait hors de la classe, hors de la présence du maître (…) ne porte qu’un intérêt éducatif limité.” (circulaire du 23/11/1956).
 
auteur(s) :

S. Billon

contributeur(s) :

J.-L. Jambou, C. Vauloup, I. Reverté, Collège Jean Moulin, Marolles les Braults

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